Les grilles venaient de se refermer. Mon avocat n’avait plus d’espoir. Tous les recours avaient été épuisés. J’entendais derrière moi les pas qui s’éloignaient. Ca ne pouvait pas être possible, me disais-je en plongeant mon visage dans mes mains. Je suivis le gardien. Je passais les sept portes en silence. La dernière s’ouvrit sur un ciel bleu. Il faisait beau en plus. Même pas un temps à l’avenant de la nouvelle que l’on venait de porter. Je franchis les épaules lourdes d’un poids incommensurables cette porte, et mis le pied dehors. Florence était là, elle m’attendait le long du trottoir.
- Comment a-t-il pris la nouvelle, vînt t’elle immédiatement me demander
- Bien pour ce genre de nouvelle
Et elle s’effondra sur mon épaule, en larmes.
Florence s’était la petite amie de Philippe. Philippe, mon frère de sang. A qui je venais d’apporter la plus terrible nouvelle. Le dernier recours contre sa condamnation à mort avait échoué. Moi, j’étais libre depuis trois mois. Putain, ce n’était pas possible. Mourir pour ça …
Tout avait commencé six mois plus tôt. Avec Philippe, on avait pris trois semaines de vacances en Colomlivie, petit état indépendant d’Amérique du Sud. Tout se passait apparemment normalement jusqu’au jour où nous avons été interpellé pour un contrôle routier dans la ville Tchichica, au sud du pays. Les deux motards n’étaient pas au premier abord franchement sympathique. Ils nous ont sèchement ordonné de sortir de la voiture de location et nous ont demandé nos passeports. Philippe avait laissé le sien à l’hôtel. Sur ce, ils nous ont mis les mains dans le dos et nous ont passé les menottes. Le ton est monté entre nous et un des policiers. Ce dernier a alors sorti sa matraque et a entrepris sans autre formalité un passage à tabac sur Philippe. Les coups pleuvaient. Dans les côtes, les jambes, au visage … Le flic était devenu complètement hystérique. La foule se dispersa comme le vent. Philippe criait au flic d’arrêter, mais l’autre continuait de plus belle. Et là, je ne sais pas pourquoi, j’ai sauté la tête la première sur ce connard de flic. Nous sommes tous les deux tombés au sol. Dans la chute, ce dernier a heurté le trottoir de la tête et a été assommé. Mais le pire en fait dans tout ça, c’est que ce flic n’avait pas bouclé son porte revolver, et dans la chute ce dernier est tombé au sol. Pendant ce temps Philippe s’était lui aussi écroulé par terre … Le second flic, n’a dans un premier temps pas su quoi faire. Il a appelé son collègue, mais celui-ci était K-O. Il a alors sorti son arme et m’a menacé … J’ai tenté de lever mes mains, mais elles étaient solidement attaché dans mon dos … Je ne sais pas ce qui est passé dans la tête du flic, mais il a tiré, et m’a envoyé une balle dans le tibia … Et là j’ai entendu une seconde détonation et j’ai vu le deuxième flic s’écrouler. Philippe, par je ne sais quel manœuvre avait réussit à prendre l’arme du premier flic tombé au sol, et s’était tortillé jusqu’à pouvoir presser la gâchette …
Mais manque de peau, il avait tué le second flic. Une deuxième patrouille est arrivé cinq minutes plus tard et a trouvé la scène dans toute son horreur. Philippe avait finalement perdu connaissance, moi j’étais en état de choc, une balle dans la jambe, et deux flics sur le carreau. Un mort et un autre dans les vaps.
Ils nous ont soigné (Philippe avait quatre côtes de cassées et un genou en vrac) avant de nous jeter en prison. Le procès n’a pas tardé. J’ai pris trois mois ferme et Philippe a lui été condamné à la peine de mort. Le consul nous a expliqué que les Colomliviens voulaient montrer qu’ils étaient maîtres chez eux. On n’a jamais dit le contraire. Et que la seule chose qu’il avait pu faire et qu’ils avaient accepté, c’était de réduire ma peine au minimum. Les Colomliviens ne voulant rien entendre concernant le cas de Philippe qui avait tué un représentant de la Colomlivie, crime impardonnable venant d’un étranger. On s’est alors rattaché à l’espoir de voir sa peine commuer en prison à vie, mais tous les recours ont été un à un rejetés. Aujourd’hui c’était l’ultime. Philippe l’a pris stoïquement. Mais je sais qu’il n’en est rien.
Florence continuait à inonder le creux de mon épaule. Ils devaient se marier dans trois mois. Au lieu de ça, c’est un statut de pseudo veuve qui se profilait. Chienne de vie va. Je la fis monter dans la voiture. Au troisième feu rouge, deux motards apparurent dans le rétroviseur. Ils nous dépassèrent et nous firent signe de nous ranger. Ils nous demandèrent nos passeports, contrôlèrent sommairement, puis nous souhaitèrent une bonne fin de journée et repartirent. L’ironie de la situation était à en mourir. Non !
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