17 août 2006

Natacha II


Natacha ôta son regard du corps nu étendu sur le lit. Un mince filet de sang coulait entre les lèvres de la jeune inconnue.
Hier encore, si pleine de vie, si brûlante de désir, et aujourd’hui bien plus reposée. Bien plus morte.
Natacha regarda l’heure, et se hâta d’aller prendre une douche. Le général devait arriver en fin de matinée. Il était donc préférable d’être fraîche et sur son 31.
Après sa douche, elle enfila son uniforme. Puis alluma une cigarette et se rendit à la fenêtre. Il n’était nullement question de l’ouvrir, les températures négatives étaient à cette époque suffisamment dissuasives de toutes exubérances. Mais les ports du nord de la Russie avaient ce charme climatique, qui faisait que leur grisaille quasi quotidienne ne poussait jamais à l’exaltation, à l’emportement de soi. De la mesure en tout, voilà ce qu’aurait sûrement dit le général s’il s’était trouvé devant cette fenêtre, à cet instant précis. La jeune Ouzbekt reposant sur le lit, n’avait pas eu le temps de faire trop de dégâts. Dommage qu’elle ne fût pas de leur camp, se dit Natacha. Elle avait du talent à revendre. Et dans bien des domaines, rajouta t’elle à son intention, une petite étincelle de lubricité traversant ses pupilles.
Natacha décrocha le téléphone, et composa un numéro que même sous les pires tortures elle ne se rappellerait pas. Elle y aboya des ordres bref. Puis elle jeta une dernière fois un regard vers le lit. Dans 10 minutes, tout au plus, un service de nettoyage viendrait nettoyer cette chambre. Arrivé sur le pas de la porte, elle se retourna, et envoya du bout des doigts un baiser vers le corps de l’Ouzbekt.
Une fois dehors, elle enfila rapidement son manteau. Puis elle prit la direction du restaurant « Kikourk », Alexandrov ne lui refuserait pas un bon petit déjeuner. Cette nuit l’avait aussi épuisé, et un bon repas la remettrait un peu d’aplomb avant l’arrivée du général.
Car elle le savait, le général lui répétait suffisamment, « Les cosaques attaquent » Natacha. Alors autant être à son maximum. Autant avaler un solide déjeuner. Elle tourna à l’angle de la rue et prit l’avenue Lénine en direction du restaurant. L’air était frais et vivifiant. Elle se répéta pour elle-même encore une fois la phrase délicieuse du général, « Les cosaques attaquent Natacha » …

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